En imaginant la vie du seul enfant que Rousseau aurait pu retrouver, Isabelle Marsay croise les destins du père et du fils donnant à voir le quotidien d’une époque paradoxale : siècle des Lumières, ultimes heures de la féodalité, décor naturel d’une histoire presque authentique : celle d’un homme qui abandonne ses enfants puis écrit des traités d’éducation qui feront date jusqu’à nos jours.
Interrogeant la conscience et les contradictions de Rousseau, dont la faute sera révélée au grand jour par Voltaire, Isabelle Marsay nous offre un roman surprenant, avec des personnages hauts en couleur, de l’amour, de la haine, de la cupidité et de la générosité, sous-tendu cette question : comment le pédagogue de L’Emile a-t-il pu abandonner cinq enfants ? Faut-il condamner notre philosophe, le plaindre ou s’abstenir de le juger ?
Celui qui ne peut remplir ses devoirs de père n’a point le droit de le devenir.
La voie des Indés
Une histoire inspirée d'un fait réel
J’ai trouvé cette partie franchement très intéressante car une réalité pas forcément très connue nous est montrée. Les mots d’Isabelle Marsay nous emporte dans cette époque et, tout au long de ma lecture, j’ai véritablement eu l’impression de me retrouver au siècle des Lumières, d’évoluer au côté de Baptiste. Le lecteur peut sentir un travail de recherches très approfondies pour nous livrer une histoire très réaliste et surtout convaincante. Tout ce côté historique et sociologique est passionnant. Pour moi, cet aspect du roman est un véritable coup de cœur. Toutefois, ce n’est pas le seul point qui fait de cet ouvrage une excellente découverte.
A la découverte d'un philosophe
Par ailleurs, cela permet aussi de réaliser une approche de Rousseau, de sa philosophie, de sa vie et de son œuvre qui sont résolument captivants. En effet, le lecteur cerne mieux, finalement, qui fut Rousseau. Toutefois, le tout reste vraiment très accessible. Mes cours de philosophie commencent à dater mais je n’ai eu aucun mal à comprendre les enjeux, les contradictions entre les actes du philosophe et sa pensée notamment concernant l’éducation des enfants.
Tout cela pour en venir à ce point, Le fils à Jean-Jacques ou la faute à Rousseau propose une réflexion intéressante sur cette invraisemblance qui me fait penser au célèbre adage « Fais ce que je dis, pas ce que je fais ». Isabelle Marsay nous donne toutes les pistes, tous les arguments pour nous faire notre propre opinion : le condamner, le plaindre ou s’abstenir de le juger ? Ce qui m’a plu, en définitif, c’est que l’auteur reste neutre. Elle ne prend pas position pour vraiment laisser son lecteur décider par lui-même. Cette technique me fait penser, dans une certaine mesure, à celle qu’utilisait Socrate pour amener ses élèves à réfléchir sur un problème donné en posant les bonnes questions. Sa technique est celle de la maïeutique. Je ne développerai pas plus sur ce point.